Tracts de Crise (N°48) - Ralentir

Tracts de Crise (N°48) - Ralentir

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« Ruse de la raison historique, le virus nous aura permis de mettre des mots sur le malaise de notre civilisation. Nous nous interrogions sur la mondialisation, l’environnement ou le populisme. Or nos inquiétudes n’étaient que les symptômes d’un mal plus profond, mais aussi plus simple à soigner : la vitesse. L’accélération perpétuelle, épuisante, destructrice. » Gaspard Kœnig

Détails du livre

Commentaires

Très bel essai, inspirant et plaisant à lire

« Très bel essai sur le ralentissement que provoque la crise du covid, ses bienfaits au milieu de ses troubles et la prise de conscience que celui-ci génère dans une perspective historique. Merci GK ! »

Réaction au tract de Gaspard Koenig

« Bonjour,
Ce qui suit est en réaction au tract de l'auteur Gaspard Koenig, intitulé "ralentir". A celui qui me lira, pardonnez mon ton un peu ironique (je ne suis pas du tout coutumier de ce genre d'exercice), mais je considère que publier un auteur lui confère une responsabilité importante, celle d'un travail précis et d'une pensée juste. Je m'attendais à un travail plus élevé. Je conçois que la critique est très facile et finalement assez stérile, mais je suppose que ma propre "pensée" n'intéressera à juste titre personne, inconnu que je suis (mais pour détailler un peu, simple cadre supérieur parisien occupé par son travail, sa vie de famille, qui se pique d'avoir un semblant d'activité intellectuelle).
Meilleures salutations,
***
Certains individus prennent mieux la lumière que d’autres. Gare au coup de soleil. Il est relativement aisé pour qui sait bien lire et bien écrire de donner un jour littéraire à un « tract » comme celui que Gallimard a publié récemment sous la plume de Gaspard Koenig. Il est même louable de proposer une réflexion sur notre époque, et puiser dans le fonds philosophique de notre culture commune pour étayer son propos. Mais le texte publié sous le titre « Ralentir » présente plusieurs limites, et font douter du bien-fondé du travail de l’éditeur. Il est vrai que disposer d’une relative notoriété est à la fois ce qui sauve l’écrivain, qui peut ainsi être publié, et c’est son péril, puisque il est contraint à écrire, même lorsque il a peu à dire.
Ce « tract » pèche tout d’abord par sa naïveté. On aurait pu attendre d’un écrivain et philosophe tel que se présente l’auteur, qui ne renierait probablement pas la qualification d’écrivain « politique »,un travail plus approfondi, facilité par le contexte actuel. Il a visiblement préféré prendre un angle assez commun, et il nous parle de sa vie d’avant, connectée,et sa vie d’après, libérée. Notre auteur a en effet eu une révélation : avant le confinement, il avait des préoccupations futiles, plongé qu’il (et que « on ») était, dans un monde malade de sa vitesse. Il a identifié cette vitesse comme la clé de tous les problèmes, et son texte vient donc nous éclairer de cette vérité. Après un détour par Montaigne, il reprend sa conclusion : « l’intérêt de notre vie ne se résume pas par le but à atteindre mais le cheminement pour y parvenir ». Il loue donc le ralentissement, pour se départir de cette ambition et rompre avec la recherche de l’utilité, comme l’écriture de ce texte à destination de son éditeur ne le laisse pas supposer. Il est vrai qu’un intellectuel abhorre l’idée d’être un « parvenu », c’est donc fort d’une nouvelle philosophie de la vie (qui date d’environ un mois donc) que l'auteur nous enjoint, comme lui, de changer le cours de sa vie, exemplaire qu’il doit être, parvenant même à faire parler de lui, signe d’une ambition pas tout à fait éteinte, mais bon, un mois c’est peu. Après avoir fustigé les « intellectuels fumeurs d’opium »et les « pédants », en s’appuyant modestement sur Montaigne et Aron, l’auteur essayiste, défenseur de la libéralisation du cannabis, balaie dédaigneusement toute réflexion sur la signification idéologique de la crise. Les conditions politiques et économiques d’apparition, de diffusion et de traitement du virus, ses conséquences et, en résumé, la confrontation de ce phénomène avec le cadre idéologique actuel n’auraient pas semblé totalement inintéressant aux simples lecteurs. Mais non. Certes, « les virus sont aussi vieux que la vie sur terre » et préexistent à la décroissance et au protectionnisme, mais surtout à cet argument assez gratuit, et pour reprendre le style de notre écrivain, « comment ne pas voir » que c’eût été malaisé, pour un défenseur du libéralisme, d’aller plus loin. Après tout, il a le droit de penser à son plan de carrière : professeur,écrivain suivi par les grands éditeurs, responsable de relations publiques, pourquoi pas producteur de cinéma…tout cela se prêterait mal à une image de « décroissant », de détracteur du système politique et économique actuel, qualification qui le classerait dans la catégorie des intellectuels alternatifs, pire, de gauche (la vraie). Dans cette perspective, il vaut mieux flirter gentiment avec les marges que de franchir le Rubicon, ce que la lecture contemporaine de Montaigne invite à faire : car ralentir, c’est décroître. Tout ceux qui connaissent le fonctionnement d’une entreprise le savent. Enfin, l’auteur appelle à « ouvrir un débat fondamental au sein même du libéralisme », à essayer « l’autre voie fondée sur la capacité de l’individu à définir à son rythme ses propres valeurs en mêlant accomplissement de soi et expérimentation collectives ». Il semble qu’ici, il rencontre l’écueil assez commun de prendre son cas particulier pour un cas collectif, à moins qu’il n’ait simplement jugé inutile d’expliquer comment tous les employés du secteur primaire et secondaire de France, les livreurs, caissiers, fonctionnaires, etc pourraient participer à ce « débat », explorer cette « autre voie » et proposer à leur employeur de « définir à son rythme ses propres valeurs ». L'auteur se contente d'asséner sa révélation, il a découvert la vertu du ralentissement et se croit en devoir de répandre la bonne parole. Il essaie même de marcher sur l’eau, en évoquant la possibilité d’associer le progrès, la création de richesse et les « politiques publiques de ralentissement », sans pour autant développer ce qui pourrait furieusement ressembler à un oxymore. Merveille de l’alchimie. On lui souhaite donc un bon voyage à cheval, en espérant qu’il en revienne avec un recueil de poésie ou un roman épique. *** Grégory Bertrand »

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